Carmel de la Trinité
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L’humilité est le ciment de notre édifice spirituel.(Ste Thérèse d'Avila)

Homélie de la Fête de la Sainte Trinité - 26/05/2013                   par Fr. Didier-Marie de la Trinité (Carme à Lisieux)

Frères et Sœurs,

Huit jours après la fête de la Pentecôte, la fête du don de l’Esprit Saint, nous sommes invités à célébrer la fête de la Sainte Trinité. elisabeth_trinite.JPG

Séminariste, j’ai été profondément marqué lors d’une rencontre avec un homme qui s’était converti à l’Islam parce  qu’il n’arrivait pas à comprendre le mystère de la Trinité.

Or ce mystère ne s’adresse pas d’abord à notre intelligence mais à notre coeur. Il nous faut pouvoir en rendre compte. Il s’agit en premier lieu d’une expérience, d’une vie à partager.

Pour entrer dans ce beau mystère, je vous propose de prendre pour guide,
sœur Elisabeth de la Trinité, carmélite de Dijon.

À 21 ans, peu avant d’entrer au Carmel et après avoir longuement parlé avec le Père Vallée, Elisabeth Catez révèle à son ami le Chanoine Angles, le nom qui sera le sien au Carmel : Marie-Elisabeth de la Trinité et elle précise : « J’aime tant ce mystère de la Sainte Trinité, c’est un abîme dans lequel je me perds. » (L 62, du 14 juin 1901)
Un an plus tard, elle écrit à son amie Germaine de Gemeaux :
« Si vous voulez bien me donner votre âme, je la consacrerai à la Sainte Trinité
afin qu’elle vous introduise dans la profondeur du Mystère, et que ces Trois que nous aimons tant toutes deux soient vraiment le centre où s’écoule notre vie ! » (L 136, du 14 septembre 1902)
Quelques années plus tard, elle écrit à Madame de Sourdon : « Dès ici-bas, il nous permet de vivre en son intimité, et nous commençons en quelque sorte notre éternité, vivant en “société” avec les trois Personnes divines. » (L 223 du 20 janvier 1905)

A travers ses quelques extraits, nous sentons bien que pour Elisabeth, la Trinité est un mystère de vie, de relation. Il y a là tout une dynamique dans laquelle elle se laisse emporter et dans laquelle elle voudrait voir ses divers correspondants s’immerger.
La Sainte Trinité est pour Elisabeth : « Notre demeure, notre “chez nous”, la maison paternelle d’où nous ne devons jamais sortir. » (Ciel dans la Foi, n° 2)

Nous savons bien que c’est au moment de notre baptême que la Trinité Sainte vient faire sa demeure au plus intime de notre être et qu’alors nous sommes invités à demeurer au sein des Trois. Dans les lettres écrites lors de la naissance et du baptême de sa nièce Elisabeth, elle insiste particulièrement sur cette réalité. Elle écrit à sa sœur : « Je me sens toute pénétrée de respect en face de ce petit temple de la Sainte Trinité. Son âme m’apparaît comme un cristal qui rayonne Dieu, et si j’étais près d’elle, je me mettrais à genoux pour adorer Celui qui demeure en elle. » (Lettre 197)
Quelques jours plus tard, c’est à ses tantes qu’elle confie : « Je me réjouis d’adorer la Sainte Trinité en cette petite âme devenue son Temple par le Baptême. Quel mystère !... » (Lettre 198, du 9 avril 1904)
Avec Élisabeth, nous sommes invités à découvrir en tout chrétien, la présence mystérieuse de la Trinité Sainte et à l’adorer… Quel changement de perspective cela opèrerait dans nos relations, si nous envisagions l’autre comme porteur de la présence trinitaire et qu’en premier lieu, nous adorions cette présence en lui.
Élisabeth nous redit cette vérité fondamentale de la foi : par le Baptême, nous appartenons à Dieu, nous somme marqués de son sceau. Elle écrit dans un traité spirituel : « Oui nous sommes devenues siennes par le Baptême, […] appelés à recevoir le sceau de la Sainte Trinité […] participants de la nature divine. » (Le Ciel dans la Foi, n° 27) ou encore : « C’est le baptême qui t’a faite enfant d’adoption, qui t’a marqué du sceau de la Trinité. » (Grandeur de la Vocation, n° 9)
Et ce qui est véritablement en jeu, c’est notre sanctification, notre divinisation. Par le baptême nous sommes “épouser” : « C’est le Père, le Verbe, l’Esprit envahissant l’âme, la déifiant, la consommant en l’Un par l’amour. » (Note Intime, n° 13)

Cette vie trinitaire nous la vivifions en nous par l’écoute et la méditation de la Parole : « C’est toute la Trinité qui habite dans l’âme qui l’aime en vérité, c'est-à-dire en gardant sa parole. » (Dernière Retraite, n° 28) Par l’écoute du Verbe de Dieu, de Bien-Aimé, crucifié par Amour : « Demeurons toujours unies au pied de la Croix, restons silencieuses auprès du divin Crucifié et écoutons-le. Tous ses secrets, Il nous les dira, c'est Lui qui nous conduira au Père, à Celui qui nous a tant aimées “qu'Il nous a donné son Fils unique”. » (L 58, à Margueritte Gollot, du 2 juin 1901)
Se laisser emporter par le Fils vers le Père dans le souffle de l’Esprit. C’est bien ce que nous vivons au cours de cette célébration Eucharistique.
Elisabeth nous invite à vivre au sein des Trois et à nous « livrer à leur action créatrice » (Note Intime n° 15)

Il s’agit donc de « faire la volonté de ce Père qui nous a aimées d’un éternel amour. » (L 138 à Madame Angles, du 29 septembre 1902) Pour cela, il faut laisser le Père « nous couvrir de son ombre » (Cf. L 246, L 269, L 278), « se pencher sur nous » (L 231, NI 15). Ainsi il nous « communiqueras sa puissance pour que nous l’aimions d’un amour fort comme la mort » (L 269, à sa sœur Guite, fin avril 1906)
Pour pouvoir rendre à Dieu “amour pour amour”, il faut que le Père nous communique sa puissance d’amour. Il faut le laisser se pencher sur nous, nous couvrir de son ombre… N’est-ce pas là l’essentiel de nos temps d’Oraison.
Permettre au Père « de contempler en nous son Verbe adoré » (L 121 à sœur Agnès de Jésus-Marie, du 11 juin 1902) Devenir ainsi fille et fils du Père dans le Fils Unique.

Ce Fils Unique qui « imprime en notre âme comme en un cristal l’image de sa propre beauté » (L 269, à sa sœur Guite, fin avril 1906), « qui nous conduit au Père » (L 58, à Marguerite Gollot, du 2 juin 1901), « qui s’épanche dans l’âme comme au sein du Père avec la même extase d’infini amour. » (Note Intime n° 13)

Nous percevons bien ici, qu’Elisabeth nous entraîne au sein même de la vie Trinitaire. Alors survient l’Esprit « pour opérer le grand mystère » (L 246, à Madame de Sourdon, novembre 1905), pour « nous transformer » (L 269, à sa sœur Guite, fin avril 1906), « pour faire de notre cœur un petit foyer qui réjouisse les Trois Personnes divines par l’ardeur de ses flammes. » (L 278, à Germaine de Gemeaux, 10 juin 1906) Il faut se laisser « emporter par l’Esprit d’amour » (L 194, à Madame Angles, 15 févier 1904) pour que l’Esprit « nous révèle cette présente de Dieu en nous » (L 273, à sa mère, vers le 27 mai 1906) et nous « fais pénétrer les profondeurs insondables de l’être divin » (L 274, à Mère Jeanne du Saint-Sacrement, du 3 juin 1906) pour que finalement il nous « transforme en Dieu. » (L 239 à sa sœur Guite, du 13 août 1905)

C’est cela « livrer à l’action créatrice des Trois » (Note Intime, n° 15), c’est finalement laisser notre vie s’écouler sous les étreintes de la Sainte Trinité (cf. L 246, à Madame de Sourdon, du 12 novembre 1905)

Pour conclure, contemplons un instant cette vie intra-trinitaire : le Père, de toute éternité est Père, et il livre tout ce qu’il a, tout ce qu’il est pour engendrer son Fils. Le Fils tourné vers le sein du Père se reçoit totalement de son Père. En réponse à se don, il se donne avec tout ce qu’il a et tout ce qu’il est pour que le Père soit Père. De ce mouvement de don mutuel et permanent, d’oubli de soi, de livraison de soi à l’autre jaillit l’Esprit d’Amour.
Cette circulation d’amour qui se vit de toute éternité au sein des Trois et qui a conduit à l’acte Créateur puis à l’acte Rédempteur.
Il me semble que notre sœur Elisabeth l’a non seulement comprise, mais qu’elle y a participé intensément et intimement. C’est là, je crois la source de la grande grâce qui donna naissance le 21 novembre 1904 à sa magnifique prière à la Trinité.
En lisant, en méditant, en vivant sa prière à la Trinité, nous sommes emportés dans la périchorèse divine, nous vivons au sein des Trois.
Ecoutons ce qu’elle écrivait à sa mère, le 20 octobre 1906 :
« Il y a un être qui est l’Amour et qui veut que nous vivions en société avec Lui. […]
Il est là qui me tient compagnie. […]
Fais comme moi, tu verras que cela transforme tout. » (L 327)

Alors, frères et sœur, en cette fête de la Sainte Trinité, confions-nous à la bienheureuse Elisabeth de la Trinité : “donnons-lui notre âme, pour qu’elle nous introduise dans la profondeur du Mystère et que les Trois soient vraiment le Centre où s’écoule notre vie” (Cf. L 136) C’est là « notre “chez nous”, la maison paternelle d’où nous ne devons jamais sortir. » (Ciel dans la Foi, n° 2)
Amen