Carmel de la Trinité
Metz-
Plappeville
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Dieu semble n’attendre que d’être aimé pour AIMER.(Ste Thérèse d'Avila-Fondations 3,18)
L’humilité


Ste Thérèse d’Avila parle souvent de l’humilité dans ses écrits. Nous avons retenu quelques passages qui en montrent l’utilité et même la puissance car c’est une attitude qui attire la grâce au point de faire
« craquer » le Seigneur de Gloire ! Ecoutons-là

« Dans le jeu d’échec, c'est la dame qui fait
échec et mat au Roi, et toutes les autres pièces y aident. Il n'est dame comme l'humilité pour obliger le Roi divin à se rendre; c'est ’humilité qui a amené le Seigneur du ciel dans les entrailles de la Vierge, et l’humilité aidant, il suffit d'un cheveu pour Le lier à notre âme.
Sachez que plus on est humble, mieux on Le possède, et on Le possède d'autant moins qu'on manque d'humilité…je ne puis comprendre qu'il puisse y avoir, humilité sans amour, ni amour sans humilité, de même qu'il n'est pas possible que ces deux vertus existent sans un grand détachement
de tout le créé. »
Chemin de perfection 16,2

 L’humilité est un chemin spirituel sûr :
« Celui qui vous aime vraiment, mon Bien,
et mon Dieu est en sûreté sur une route large
et royale; le précipice est loin; à peine a-t-il bronché un tantinet que Vous lui tendez, Vous, Seigneur, la main. S'il Vous aime et n'aime pas les choses du monde…il marche dans la vallée de l'humilité. »
Livre de la Vie 35,14x

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Mais qu’est-ce donc que l’humilité ?

« Un jour où je me demandais pour quelle raison Notre-Seigneur aime tant cette vertu d'humilité, ceci, soudain, me parut évident: Dieu est la suprême Vérité, et l'humilité, c'est être dans la vérité; en voici une fort grande: nous n'avons de nous-mêmes rien de bon, nous ne sommes que misère, et néant; quiconque ne comprend pas cela vit dans le mensonge. Plus on le comprend, plus on est agréable à la suprême Vérité, car on vit en elle. Plaise à Dieu, mes sœurs, de nous faire la grâce de ne jamais nous écarter de cette connaissance de nous-même. » 6 Dem. 10,7

Et de nous donner un moyen pratique très accessible:
« Fixez votre regard sur le Crucifix, et tout vous semblera facile.
Alors que Sa Majesté nous a manifesté son amour par tant d'actes…comment voulez-vous ne le satisfaire qu'avec des mots?
Être un vrai spirituel, savez-vous ce que cela signifie?
C'est se faire les esclaves de Dieu; ceux-là sont marqués, au fer,
du signe de la croix, car ils lui ont déjà donné leur liberté…
comme je l'ai dit, l'humilité est le fondement de notre édifice spirituel; Donc, mes sœurs, pour que cet édifice ait de bonnes fondations, tâchez d'être la plus petite de toutes,
l'esclave de toutes vos sœurs,
cherchez comment et en quoi vous pouvez leur être agréable et les servir
7Dem.4,8
 

La connaissance de soi est nécessaire, mais il faut arriver à se regarder sans se décourager. Thérèse ici nous explique comment y parvenir et par quel fonctionnement la pratique de l’humilité opère un vrai progrès en nous.
« Jamais nous n'arriverons à nous connaître si nous ne cherchons pas à connaître Dieu; en contemplant sa grandeurs penchons-nous sur notre bassesse;
en contemplant Sa pureté,
nous verrons notre saleté;
en considérant Son humilité, nous verrons combien nous sommes loin d'être humbles.
On trouve à cette perspective deux avantages: premièrement, il est clair que quelque chose de blanc parait plus blanc auprès de quelque chose de noir, et, à l'opposé, le noir auprès du blanc; deuxièmement, notre intelligence et notre volonté se disposent mieux à accomplir tout ce qui est bien lorsque notre regard se tourne vers Dieu; il y a de grands inconvénients à ne jamais sortir de notre boue et de notre misère. Si nous vivons enfoncés dans les misères de notre terre, jamais nous ne sortirons du courant boueux des craintes, des pusillanimités, et de la lâcheté. C'est pourquoi je dis, mes filles, que nous devons fixer nos regards sur le Christ, notre bien; là, nous apprendrons la véritable humilité; en Lui et en ses Saints, notre intelligence s'ennoblira comme je l'ai dit.» 1Dem.2,9

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Nous touchons ici un autre aspect de la question : l’humilité dans
la pratique de l’oraison. Thérèse s’adresse aux spirituels qui ont
connaissance des grâces élevées que le Seigneur accorde quelquefois à ses fidèles. La tentation qui les guette serait de chercher par soi-même à s’élever vers Dieu.
Thérèse nous mets en garde avec grande sagesse.

« Comme tout notre édifice spirituel est fondé sur l'humilité,
plus nous sommes près de Dieu, plus cette vertu doit grandir,
sinon tout est perdu. Il y a une sorte d'orgueil à vouloir goûter des délices spirituels de nous-même, alors que Dieu fait déjà trop, étant donné ce que nous sommes, en nous rapprochant de Lui. Quand je dis que nous ne devons pas nous élever sans que Dieu
nous élève, je parle le langage de l'esprit; ceux qui en ont une
certaine expérience me comprendront. Dans la théologie mystique
dont j'ai commencé à parler, l'entendement cesse d'agir, car
Dieu le suspend… Prétendre ou penser à le suspendre nous-même,
voilà ce que je demande de ne point faire; il ne faut pas non plus
cesser de l'utiliser, sous peine de devenir froid, stupide, et de ne
rien obtenir; car quand le Seigneur suspend et arrête notre
entendement, Il lui donne de quoi l'émerveiller et l'occuper, et
sans raisonnement, le temps d'un credo, Il lui fait comprendre
plus de choses que ne l'obtiendrait en beaucoup d'années toute
notre application terrestre. Utiliser les puissances de l'âme et
croire les immobiliser, c'est de la folie. Je répète que, même sans
nous en douter, nous ne montrons pas ainsi une grande humilité,
pas par notre faute, mais nous aurons, oui, la peine d'avoir
travaillé en vain; l'âme en conçoit une petite contrariété,
comme une personne prête à sauter qu'on retiendrait par
derrière; elle garde l'impression d'avoir usé sa force sans effet;
au peu de profit qu'on en tire, on distingue, en y regardant bien,
le tout petit manque d'humilité dont j'ai parlé. Car cette vertu a ceci d'excellent que jamais action qu'elle accompagne ne laisse du déplaisir dans l'âme. Je crois l'avoir fait comprendre Plaise au Seigneur d'ouvrir les yeux de ceux qui me liront et qui auront de l'expérience, car pour peu qu'ils en aient, ils comprendront immédiatement. »
Livre de la Vie 12,4-5